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Résolution de conflit

À voir pour démarrer : Communication heureuse, car la meilleure façon de résoudre un conflit est l'éviter.

Un conflit n'est pas, en soi, une mauvaise chose. Il est même parfois nécessaire, afin que chacun puisse parler de ses limites et être entendu. Ce qui est mauvais, c'est que des gens soient blessés1), ce qui arrive facilement dans les conflits. C'est plus facile d'éviter les dommages si les discussions se font dans un cadre apaisé et respectueux.

En cas de conflit, il y a plusieurs rôles possibles :

  1. Vous êtes un des membres actif du conflit et vous aimeriez que ça s'arrête.
  2. Vous êtes un des membres actif du conflit et vous êtes dedans, pas en train de lire cette page.
  3. Vous n'êtes pas engagé dans le conflit mais vous souhaitez aider les belligérants à retrouver leur calme.
  4. Vous êtes témoins, tout ça vous secoue, mais vous vous dites que vous n'avez rien à voir avec tout ça.

Nous allons étudier chaque cas un par un en voyant ce qu'il est possible de faire.

Actif dans le conflit, cherchant à l'apaiser

Vous n'êtes pas d'accord, certes. Vous êtes persuadé que l'autre en face a tort, ok. Mais vous ne voulez pas pour autant qu'on en vienne à s'insulter et se faire mal. Vous aimeriez revenir à une polémique constructive, ou simplement mettre fin à la discussion puisque aucun accord ne semble actuellement possible.

  • Si vous êtes seul, envisagez de fuir. Si vous êtes en groupe, proposez aux autres de stopper là et d'aller faire autre chose. L'option de la fuite doit s'envisager d'autant plus qu'il n'y a rien à faire.
  • Si vous ne pouvez ou voulez pas fuir : reprenez les principes de communication heureuse. Parlez toujours de vous-même, ne jugez jamais l'autre. Restez de votre côté de la relation. Respectez-vous et respectez votre adversaire.
  • Nommez les émotions qui vous traversent, sans chercher à les justifier. Oui, ça peut faire bizarre dans la conversation. Bonne nouvelle, rien de tel que le bizarre pour déstabiliser et faire chuter la tension.
  • Respirez. Prenez une grande inspiration, puis expirez lentement. Recommencez jusqu'à vous sentir moins envahi.
  • Prenez du recul. Ne vous contentez pas de le faire dans votre tête : bougez, changez de position, afin de désamorcer votre propre agressivité, le stress (positif ou négatif) que fait naître le conflit en vous. Si vous êtes assis à votre bureau, levez-vous avant de vous rasseoir ; regardez par la fenêtre un instant ; détournez au moins les yeux de l'écran pour les poser sur quelque chose de neutre ou d'apaisant.
  • Faites appel à un modérateur, à une tierce personne, qui pourra intervenir pour pacifier sans être de parti pris.

Voyez aussi la partie concernant les modérateurs, il y a tout ce qu'il faut.

Mode Berserker

Vous êtes en colère, ça va pas, vous n'allez pas laisser ces péquenauds gagner.

Il y a une forte probabilité pour que vous ne lisiez pas ce texte au moment du conflit… Mais peut-être avant, ou après et dans ce cas, peut-être que quelques mots reviendront à travers la colère et arriveront à limiter les dégâts.

Vous avez le droit d'être envahi par une émotion puissante. Reconnaissez-le. Nommez-la. Montrez-la.

Mais vous n'êtes pas obligés de laisser cette émotion détruire les choses et les gens. Trouvez des façons de canaliser cette énergie pour qu'elle ne blesse personne : en tapant sur un punching-ball, en allant se battre dans une arène de jeu…

Les émotions “envahissantes” ne sont jamais anodines. Elles sont souvent le signe d'une blessure plus ancienne, très enfouie. Ça ne veut pas dire qu'il faut forcément aller voir un psy, et non, vous n'êtes pas fou ; bien qu'un psy puisse aussi aider. Mais il y a d'autres façons de faire : théâtre, croyances religieuses, jeu de rôle, écriture, expression artistique, etc2). La démarche est toujours la même :

  • Reconnaître le point douloureux, ce qui passe par le fait de dire “oui, je me met facilement en colère dans ce genre de cas”.
  • Donner du sens à cette souffrance, à travers le dialogue (avec soi, avec un autre, à travers une pratique).
  • Sublimer cette souffrance : la transformer afin qu'elle ne soit plus de la souffrance, juste une épreuve que nous avons traversé et dont nous sommes sortis. Cela passe souvent par des actes symboliques3) ; là encore, pour que ce soit efficace et sans danger, il est fortement conseillé d'être accompagné.

Travaillez sur vos blessures afin d'être moins dans le réactionnel lors des conflits.

Et si je m'amuse bien dans le conflit ?

Vous êtes un troll.

Mais vous le saviez déjà, non ?

Certaines personnes prennent effectivement du plaisir dans le conflit. Ce n'est pas condamnable en soit ; ce sont des personnes qui peuvent faire de très bons modératrices, car elles n'ont justement pas peur des coups. En dehors d'internet, elles peuvent être de bonnes guerrières, donc aussi de bonnes protectrices. Aimer le conflit n'est pas le problème ; le problème viens de la façon dont on va l'exprimer.

On peut être dans une saine agressivité, par exemple dans un sport de combat, où chacun est d'accord pour se taper dessus et prendre des coups. Dans ce cas, la notion importante est le consensus : tout le monde est d'accord pour se taper, il y a des règles pour dire quand on arrête.

Un autre exemple d'agressivité bien dirigé est l'énergie qu'on peut mettre à protéger et apaiser. La difficulté étant de ne pas devenir attaquant à son tour.

Là où ça ne va plus, c'est quand l'autre n'est pas d'accord pour se faire taper. Quand quelqu'un va souffrir “pour de vrai”. Pour de vrai, ça ne veux pas dire “en dehors d'internet” : les gens qu'on fréquente sur internet sont réels, et les insultes qu'on peut leur faire le sont aussi.

Si vous vous amusez dans le conflit, trouvez une façon constructive d'employer votre agressivité. Sinon, la société tolère mal les comportements destructeurs et vous le fera payer, de façon plus ou moins délicate. Au sein d'une communauté internet, cela peut se solder par un simple bannissement. Dans le cas de harcèlement et d'insulte, il peut y avoir dépôt de plainte auprès de la justice, amenant à un procès très concret, même si les faits ont eu lieu sur internet.

Trouvez les bonnes limites à votre amusement.

Modérateur, médiateur et pacificateur

Ces trois mots regroupent un rôle similaire : apaiser le conflit, permettre à chaque partie de se sentir entendu et respecté, les amener à trouver une solution à leur problème et que chacun reparte content. À peu près.

Cette fois, en plus de tout ce qui a déjà été dit, c'est la Communication Non Violente4) qui nous donne les outils les plus performants.

Avant de vous lancer dans une médiation, soyez sûr d'être “OK”. Neutre, sans parti pris, bien dans votre peau. Si vous vous sentez dépassé, respirez plusieurs fois, calmement et bougez votre corps5). Demandez du soutien à des collègues si c'est trop compliqué à gérer. Plusieurs personnes neutres et posés au sein d'un conflit aident à calmer les esprits.

Votre rôle en tant que modérateur va être d'aider chacun des acteurs du conflit à s'exprimer de façon utile, sur 4 thématiques :

  • Ce que chacun observe (les faits)
  • Ce que chacun ressent
  • Ce dont chacun a besoin
  • Ce que chacun demande

Et une fois que chacun a pu s'exprimer sur ces sujets, suivant les besoins et demandes, ce que l'autre peut concéder.

Invitez chacun à s'exprimer en parlant de soi (le “je”), sans reproche et critiques ; invitez-les aussi à écouter les autres sans les couper, avec empathie, sans s'arrêter aux défauts de formulation que vous reprendre en tant que modérateur.

Observation

Chacun doit expliquer factuellement ce qu'il a observé comme significatif dans le conflit. Il ne s'agit pas de dire ce qu'on pense, mais ce qu'on a vu ou entendu, sans juger si c'est bien ou mal.

Exemple : “J'ai entendu les mots Ta mère est une gnou.”. Vous avez vu, on n'a même pas besoin de dire “c'est lui qui l'a dit” : ce qui compte, plus que la personne qui les as dites, ce sont les mots qui ont été entendus.

Autre exemple : “J'étais en train de traquer ce mob, cette personne est arrivé et l'a tué devant moi.” Là, il faut bien nommer l'auteur, mais on peut éviter les mots jugeant comme “voler ma proie”.

On peut croiser les faits, racontés par l'un et l'autre groupe, avant de passer à la suite, mais c'est parfois plus simple de faire parler l'un jusqu'au bout, puis de passer à l'autre partie, de lui demander ce qu'elle a entendue, de reformuler. Si vous faites un va et viens, veillez à ce que chaque étape se fasse l'une après l'autre et que tout le monde participe correctement.

En tant que modérateur, reformulez soigneusement, afin que ça reste au niveau des faits. Amenez les autres à la conscience des mots jugeants.

Sentiment

Ensuite, quel est le sentiment fasse à ce qui a été observé ? Pour certains, c'est plus facile de commencer par “je me sens…” ou de leur demander comment ils se sentent.

  • Je me sens en colère qu'on compare ma mère à un gnou.
  • Je me sens volé, spolié de ma proie

Besoins

À présent, chacun va exprimer ses besoins. Quelle valeur personnelle a été blessée ? Qu'est-ce qui a entamé notre bonne humeur ? Les questions sont “De quoi as-tu besoin ? qu'est-ce qui est important ?”

  • J'ai besoin qu'on me respecte. Lorsque ma mère est comparé à un gnou, je me sens moi-même comparé à un gnou, et je n'aime pas ça.
  • J'aime aller au bout des choses. J'ai une impression d'inachèvement de ne pas avoir pu chasser cette proie. J'ai besoin de pouvoir mener une chasse sans être interrompu.

Demandes

Enfin, la partie la plus difficile : une fois que chacun a exprimé sa vision des choses, ses sentiments et ses besoins, il faut passer aux propositions. Qu'est-ce qui peut être fait pour rétablir l'équilibre ? Qu'est-ce qui pourrait embellir ma journée ? Il ne s'agit pas d'une exigence, mais d'un échange : trouver quelque chose que l'un est prêt à donner, l'autre à recevoir. Cela peut être des excuses ; parfois, le simple fait d'avoir pu échanger a déjà calmé les choses. Il peut aussi s'agir de réparations, par exemple partager le produit de la chasse, s'engager à ne plus troubler la chasse de l'autre, chasser dans des lieux différents…

Invitez les deux parties à faire des propositions réalistes et en accord avec ce qu'elles ont entendu l'une de l'autre. “Serais-tu d'accord pour … ? Voudrais-tu … ? Aimerais-tu … ?”

Rappel au cadre

Dans le cas où des règles ont été transgressées, il est important de rappeler le texte de la loi, de le citer, puis de discuter avec celui qui l'a enfreint du sens de sa transgression. Il peut s'agir d'une méconnaissance ou d'une raison bien plus complexe. Un dialogue est très important sur ce genre de sujet : la transgression est souvent une façon d'attirer l'attention sur soi, de demander de l'écoute (de la plus mauvaise façon possible).

Même si l'écoute est là, il faut aussi faire respecter le cadre. S'il y a des sanctions, il faut les appliquer (en affinant au cas par cas, on ne donne pas toujours le bâton la première fois). Cela doit être fait sans colère, dans le respect de l'autre, afin de protéger la communauté. Les sanctions sont sensés êtres justes, en rapport avec la transgression. Si ce n'est pas le cas, il faut les faire évoluer. Il est important de préciser auprès de la personne qui reçoit une sanction que cette dernière est appliqué “parce que les règles doivent être respectés” et qu'il n'y a aucune haine envers la personne, mais au contraire le souhait de la voir intégrer la communauté d'une façon plus sereine.

Témoin

Vous étiez dans le coin quand ça a explosé, et vous assistez, impuissant, à la bataille entre deux personnes, ou deux groupes. Même si les coups ne vous concernent pas, ce que vous voyez vous touche. Suivant la nature du conflit et votre propre nature, le sentiment peut varier énormément :

  • Plaisir à voir une bonne baston, par exemple quand on est spectateur à un match de boxe. Bon, en dehors des conflits encadrés comme des manifestations sportives, évitez d'encourager les gens à se battre, il y en a peut-être qui souffrent dans l'affaire… Mais savourez, y'a pas de mal à se faire plaisir.
  • Envie de fuir. Et bien, fuyez, vous avez raison !
  • Malaise plus ou moins fort.

Dans ce dernier cas, vous risquez d'être une victime collatéral du conflit. C'est à dire que votre absence de réaction, votre impuissance, peuvent être mal vécues et amener quelques cauchemars. Évitons-ça.

  • Oui, ce conflit ne vous concerne pas, mais non, ce n'est pas une raison pour ne pas s'en mêler. Appelez un modérateur.
  • Exprimez tout haut votre malaise, en prenant bien soin de parler de vous et de vos sentiments afin de ne pas prendre l'agressivité des belligérants sur la tête. Si vous avez peur de le dire à des gens en train de se battre, parlez en à un ami. Ne gardez surtout pas ça pour vous, mettez des mots sur ce malaise !
  • Fuyez. Allez voir ailleurs. Ou, si vous vous sentez assez solide et qu'il n'y a personne qui est là pour le faire, devenez médiateur. Ou soutenez l'action du médiateur. Plus votre malaise est grand face au conflit en cours, plus je vous conseille de fuir : si ce qui se passe touche une de vos anciennes blessures, vous risquez d'être dans du réactionnel et donc d'envenimer le conflit en entrant dedans. Fuir est souvent la meilleure chose à faire.

Être témoin est extrêmement difficile et violent. Ne minimisez pas cette violence, sous prétexte que “ça ne vous concernait pas”. Au sein de Khaganat, nous avons des modérateurs formés à vous écouter dans ce genre de cas ; faites appel à eux, prenez le temps de discuter de ce qui s'est passé pour vous apaiser et ne pas vous faire envahir par des émotions désagréables.

Vous avez aussi une responsabilité importante en tant que témoin, celle de vous assurer que les victimes potentielles sont aidées.

Parfois, toutes les personnes engagées dans un conflit sont assez fortes pour se débrouiller seules et ne souhaitent pas d'intervention extérieures, mais si une seule personne présente souffre, alors il faut impérativement appeler les forces de l'ordre afin que la victime puisse être soutenue efficacement et que l'agression cesse. C'est plus facile en tant que témoin de contacter la modération (ou la police), puisqu'on est un peu à distance. Vous pouvez prendre un instant pour vérifier si vous avez bien compris la situation auprès des personnes engagées dans le conflit : la question “comment te sens-tu fasse à cette attaque” devrait suffire à savoir s'il s'agit d'un conflit consensuel ou s'il y a souffrance réelle. Dans ce dernier cas, cherchez de l'aide en priorité avant de décider d'intervenir ou de fuir. Vous avez le droit de fuir, toujours !

1)
Moralement, psychologiquement, physiquement… Même si le sang ne coule pas, on peut souffrir.
2)
Et suivant vos blessures, ça peut être très bien, ou vous amener à faire de vraies belles bêtises. Oui, même l'option psy, si le psy n'est pas doué.
3)
Restitution symboliques dans le cadre de la Méthode ESPERE ; expression artistique…
4)
Méthode théorisé par Marshall Rosenberg et qui est une marque déposée. Malgré ça, ça reste une assez bonne méthode.
5)
Personne ne vous voit derrière l'écran, c'est encore plus facile.
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fr/resolution_conflit.txt · Dernière modification : 2021/12/03 18:19 de 127.0.0.1

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