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 Je ne pouvais qu'admirer son professionnalisme bienveillant. Je ne pouvais qu'admirer son professionnalisme bienveillant.
  
-Elle me fit visiter le Dispensaire, du moins une partie, car le domaine était immense. Elle me parla des longues ballades à faire plus loin. Elle me présentait aussi les gens que nous croisions : il y avait dans les couloirs et entre les bâtiments une foule hétéroclite de gens en train de discuter et s'occuper à des tâches variées. Des Archaïstes à la peau basanée côtoyant des Créateurs au teint de porcelaine, les tatouages rigoureux des Urbanistes se mêlant à des Repentis aux tenues bariolées. Un joyeux mélange des castes du Khanat. Sans avoir besoin de les chercher, les infos sur ce que je voyais s'imposairnt à moi, comme si j'avais toujours su... Ce qui était sans doute le cas.+Elle me fit visiter le Dispensaire, du moins une partie, car le domaine était immense. Elle me parla des longues ballades à faire plus loin. Elle me présentait aussi les gens que nous croisions : il y avait dans les couloirs et entre les bâtiments une foule hétéroclite de gens en train de discuter et s'occuper à des tâches variées. Des Archaïstes à la peau basanée côtoyant des Créateurs au teint de porcelaine, les tatouages rigoureux des Urbanistes se mêlant à des Repentis aux tenues bariolées. Un joyeux mélange des castes du Khanat. Sans avoir besoin de les chercher, les infos sur ce que je voyais s'imposaient à moi, comme si j'avais toujours su... Ce qui était sans doute le cas.
  
 J'avais aussi une conscience aiguë des regards qui me suivaient discrètement, de l'effort que faisaient certains pour paraître enjoués et dissimuler la tension qui habitait le groupe. C'était une situation de crise, au bord de l'explosion, et je savais le voir. Sur une simple visite, j'entrevoyais les liens entre les individus, les leviers qu'il faudrait activer pour faire monter ou diminuer la pression... J'avais aussi une conscience aiguë des regards qui me suivaient discrètement, de l'effort que faisaient certains pour paraître enjoués et dissimuler la tension qui habitait le groupe. C'était une situation de crise, au bord de l'explosion, et je savais le voir. Sur une simple visite, j'entrevoyais les liens entre les individus, les leviers qu'il faudrait activer pour faire monter ou diminuer la pression...
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 Devant nous s'étendait les Brumes. Devant nous s'étendait les Brumes.
  
-À perte de vue, s'étendant jusqu'aux confins de l'horizon, elles tournoyaient, molles et indolentes, animées d'une vie qui leur était propre. S'étirant paresseusement sous la lumière des soleils, comme en attente. où que je tourne mon regard, elles étaient là. +À perte de vue, s'étendant jusqu'aux confins de l'horizon, elles tournoyaient, molles et indolentes, animées d'une vie qui leur était propre. S'étirant paresseusement sous la lumière des soleils, comme en attente. Où que je tourne mon regard, elles étaient là. 
  
 Je finis par me détourner, haletant pour reprendre ma respiration en fixant mon attention sur les bâtiments du Dispensaire et la nature qui s'étendait de ce côté. Balbutiante, je demandais : Je finis par me détourner, haletant pour reprendre ma respiration en fixant mon attention sur les bâtiments du Dispensaire et la nature qui s'étendait de ce côté. Balbutiante, je demandais :
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 Caeth s'assit un peu plus bas sur la colline, tournant le dos aux terribles Brumes, préférant elle aussi le paysage familier de l'activité des rats. Son expression tourmentée ne me plaisait guère. Caeth s'assit un peu plus bas sur la colline, tournant le dos aux terribles Brumes, préférant elle aussi le paysage familier de l'activité des rats. Son expression tourmentée ne me plaisait guère.
-\\ -Oui et non. Comment définir ce qui est normal ? Autrefois, le Dispensaire était loin des Brumes, il fallait marcher quelques jours pour les atteindre. Puis elles se sont mises à dévorer le paysage, avalant certaines nuit des régions entières. Tout le Khanat paniquait, les chamans dansaient sans s'arrêter, les probabilistes se perdaient dans leurs calculs, des sectes nouvelles proclamaient la fin du monde... Et le Khan, dans son palais de Vai'atu'a, restait silencieux. Nous ne savions pas où cela s'arrêterait, ni quelles régions seraient épargnées. Les gens fuyaient l'avancée des Brumes, mais pour où ? Chaque jour leur emprise se resserrait, avalant les gens, les contrées, les animaux. Vous devez au moins vous souvenir de ça... Les Brumes prennent, et rendent quand elles le veulent. +\\ -Oui et non. Comment définir ce qui est normal ? Autrefois, le Dispensaire était loin des Brumes, il fallait marcher quelques jours pour les atteindre. Puis elles se sont mises à dévorer le paysage, avalant certaines nuit des régions entières. Tout le Khanat paniquait, les chamans dansaient sans s'arrêter, les probabilistes se perdaient dans leurs calculs, des sectes nouvelles proclamaient la fin du monde... Et le Khan, dans son palais de Vai'atu'a, restait silencieux. Nous ne savions pas où cela s'arrêterait, ni quelles régions seraient épargnées. Les gens fuyaient l'avancée des Brumes, mais pour où ? Chaque jour leur emprise se resserrait, avalant les personnes, les contrées, les animaux. Vous devez au moins vous souvenir de ça... Les Brumes prennent, et rendent quand elles le veulent. 
  
 "Un jour, les Brumes furent là, autour du dispensaire. Que dire d'autre ? Nous ne pouvions partir sans risquer un sort hasardeux. Nous nous attendions à ce que la nuit nous avale dans l'oubli. Mais les Brumes se sont arrêtées, nous isolant comme une île. Les chamans ont déclaré que c'était l'avènement d'un nouvel Éon, le lirri'a, que nous étions peut-être l'oeuf d'origine, ou que nous l'abriterions.  "Un jour, les Brumes furent là, autour du dispensaire. Que dire d'autre ? Nous ne pouvions partir sans risquer un sort hasardeux. Nous nous attendions à ce que la nuit nous avale dans l'oubli. Mais les Brumes se sont arrêtées, nous isolant comme une île. Les chamans ont déclaré que c'était l'avènement d'un nouvel Éon, le lirri'a, que nous étions peut-être l'oeuf d'origine, ou que nous l'abriterions. 
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 La douleur reflua, me laissant épuisée. Cela avait été si soudain... L'évocation de ce lirri'a, de ce moment d'incertitude que traversait le Khanat à chaque Éon, période de changement, de bouleversement, où les règles du monde changeaient, avait provoqué cette réaction terrible, comme si ce que cela m'avait fait perdre était une partie de mon âme. Et tandis que ces réflexions cheminaient dans mon esprit, la douleur revint, tétanisante, faisant louper des battements à mon cœur et me paralysant. Caeth reprit ses murmures apaisants. Quand la seconde crise se termina, elle me proposa de rentrer au Dispensaire et de rencontrer sans délai le médecin. Je ne pus qu'acquiescer. La douleur reflua, me laissant épuisée. Cela avait été si soudain... L'évocation de ce lirri'a, de ce moment d'incertitude que traversait le Khanat à chaque Éon, période de changement, de bouleversement, où les règles du monde changeaient, avait provoqué cette réaction terrible, comme si ce que cela m'avait fait perdre était une partie de mon âme. Et tandis que ces réflexions cheminaient dans mon esprit, la douleur revint, tétanisante, faisant louper des battements à mon cœur et me paralysant. Caeth reprit ses murmures apaisants. Quand la seconde crise se termina, elle me proposa de rentrer au Dispensaire et de rencontrer sans délai le médecin. Je ne pus qu'acquiescer.
  
-Le docteur avait une petite officine dans l'un des bâtiments. Un laboratoire rempli de cornues étranges et d'alambics glougloutants le jouxtait : je reconnus le parfum familier de l'alcool et identifiais quelques pharmacopées en cours de distillation. Ou de liqueurs. Si ce petit monde vivait en autarcie depuis une décennie, il n'y avait rien d'étonnant à ce que le matériel médical ait été détourné à des buts plus khanatiens.+Le docteur avait une petite officine dans l'un des bâtiments. Un laboratoire rempli de cornues étranges et d'alambics glougloutants le jouxtait : je reconnus le parfum familier de l'alcool et identifiais quelques pharmacopées en cours de distillation. Ou de drogues. Si ce petit monde vivait en autarcie depuis une décennie, il n'y avait rien d'étonnant à ce que le matériel médical ait été détourné à des buts plus khanatiens.
  
 Le docteur lui-même était une Créatrice d'un certain âge, sa peau blanche plissée d'innombrables rides qui donnaient une grande profondeur à chacune de ses expressions. Elle m'examina froidement, accomplissant sa tâche avec rigueur et sans affect, me palpant et me posant des questions auxquelles j'avais bien du mal à répondre. Malgré sa neutralité, je sentais que quelque chose lui déplaisait. Le docteur lui-même était une Créatrice d'un certain âge, sa peau blanche plissée d'innombrables rides qui donnaient une grande profondeur à chacune de ses expressions. Elle m'examina froidement, accomplissant sa tâche avec rigueur et sans affect, me palpant et me posant des questions auxquelles j'avais bien du mal à répondre. Malgré sa neutralité, je sentais que quelque chose lui déplaisait.
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 Je racontais tout ça à Mae, qui m'écoutait religieusement.  Je racontais tout ça à Mae, qui m'écoutait religieusement. 
--Tu as déjà vu des combats de Source toi, ou t'as oublié aussi ?+\\ -Tu as déjà vu des combats de Sourcetoi, ou t'as oublié aussi ?
  
 Je fermais les yeux. Ce n'était pas un souvenir à proprement parler qui me vint d'abord en mémoire, mais le goût du sang, l'ivresse du combat, la douleur et l'exultation. Fugitivement quelques images me traversèrent l'esprit. Puis la scène fut là, devant les yeux, et je la racontais à la petite fille. Je fermais les yeux. Ce n'était pas un souvenir à proprement parler qui me vint d'abord en mémoire, mais le goût du sang, l'ivresse du combat, la douleur et l'exultation. Fugitivement quelques images me traversèrent l'esprit. Puis la scène fut là, devant les yeux, et je la racontais à la petite fille.
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