Il s'agit d'une cérémonie Spadzura qui se déroule dans la Jungle, au moment où la première pluie de la Saison des Pluies s'abat, et elle constitue le pendant de la cérémonie d'Hutshep.
À l'approche de la fin de la Saison sèche, les Spadzura convergent en grand nombre vers le coeur d'une vallée humide, étouffante, où s'écoule un vaste cours d'eau marécageux, depuis une éminence abritant des vestiges d'une ancienne cité ruinée. Leur arrivée s'échelonne généralement sur quelques jours, et lorsqu'on leur demande pour quelle raison ils viennent et comment ils savaient le moment venu, ils répondent invariablement sa'aru'i.
Lorsque les premières gouttes s'abattent, le principal officiant s'avance sur une plateforme dominant la vallée et tend vers les Cieux une coupelle sacrée pour recueillir les eaux du ciel. Il est accompagné d'un clergé improvisé qui chante des hymnes en langue ancienne pendant tout ce temps.
Une fois le récipient plein, il le descend sur une place aménagée à cet effet, au milieu de la foule et place le contenant à un endroit prévu à cet effet, qui draine l'eau des environs par des rigoles de bois taillé.
Le chant monte peu à peu puis, au plus fort, tous les présents se taisent soudainement et le prêtre jette alors une poignée de graines sacrées dans le plat. Elles se mettent à germer instantanément, jusqu'à donner un arbre, en quelques minutes.
La soirée se passe alors en fête autour de l'arbre, chants, danses et jeux alternent dans la bonne humeur. Des combats rituels retracent les grandes épopées anciennes…
Le lendemain matin, une ronde s'installe autour de l'arbre et des chants psalmodiés sont lancés en attendant qu'un signe vienne. La première feuille qui tombe de l'arbre est généralement scrupuleusement ramassée et étudiée, donnant lieu à des augures de divers types.
Selon les fois, la danse continue ainsi de quelques heures à plusieurs jours, et les Spadzura se relaient pour que jamais le chant ne retombe. On en entend la clameur de très loin.
Le chant s'arrête brusquement lorsque peu à peu s'extrait de l'arbre Baghilad-Kena, un gigantesque Spadzura. Sa première réaction sera aussi sujette à interprétation de la part des érudits et savants mais en règle générale, il se met à danser lourdement, en tapant des pieds, puis il rit en dansant de plus en plus frénétiquement. La cérémonie prend fin lorsqu'il s'arrêt enfin de danser et se met à crier par trois, tourné à chaque fois dans une direction différente. Son cri se propage extrêmement loin et on dit que les animaux s'arrêtent alors un instant et saluent dans sa direction.
Le jeu consiste ensuite pour les plus rapides et les plus aventureux de tenter de le suivre dans la Jungle, qu'il parcourt à grandes foulées bondissantes, indifférent aux branches, aux lianes et aux prédateurs, qui le lui rendent bien. Partout où il passe, la Jungle parait revivifiée, plus animée, plus vivante. Il arrive qu'on le croise dans ses voyages pendant toute la Saison des Pluies, jusqu'à la Cérémonie d'Hutshep.
Certains explorateurs ont tenté d'entrer en communication avec lui, y compris le célèbre Beos Dirman qui fut le premier à le décrire. Mais jusqu'alors on ne connait personne qui ait pu expliquer ce qu'il avait pu en comprendre.