Le vieil homme rentra dans la hutte d'un pas vif, soufflant comme un branaz en furie.
“Que les démons emportent ce… !”
Il vint à la petite table, éclairée d'une chiche lampe à graisse. Des feuillets, des parchemins roulés, des tablettes d'argile y étaient empilés en un amas invraisemblable. Il y ajouta d'un geste rageur son tanzga, manquant de peu d'écrouler l'absurde entassement, avant de s'affaler sur un tas de fourrures mitées.
“Des nuits que j'observe cela, comment l'expliquer ?”
Il frotta de ses mains osseuses les orbites de ses yeux pâles. Soupira.
Il regardait par la porte le vent qui agitait les feuilles des palmiers. Quelques cris fusaient au loin, des rugissements éclataient par moment. Impassible, il restait à fixer le ciel, cherchant à y décrypter quelque mystérieux message. Il se releva et fouilla dans ses notes, faisant enfin chavirer la pile, qu'il éparpilla tout en cherchant. Jusqu'à ce que ses mains se posent sur un petit morceau de papyrus de couleur violette1), quand un sourire rida son visage.
“Kidai et Dekai, mes petits amis ! Vous voilà…”
Il relit avec patience le texte, levant un doigt facétieux tandis qu'il faisait ronfler les consommes, proclamait les voyelles. Un caun'ai aventureux vint même jusqu'à entrer sa trompe curieuse dans la tente sans qu'il n'y prenne garde. La joie inondait ses traits. Lorsqu'il bondit soudainement, il effraya le pauvre volatile, qui aurait pris ses jambes à son cou s'il en avait eu un. Le vieil érudit reprit son tanzga et se posta au milieu de la clairière, les yeux cherchant parmi le zénith.
“C'est pourtant évident, le monde est un œuf, nous sommes à l'intérieur et le noyau est fait de Brumes !”