À voir pour démarrer : Communication heureuse, car la meilleure façon de résoudre un conflit est l'éviter.
Un conflit n'est pas, en soi, une mauvaise chose. Il est même parfois nécessaire, afin que chacun puisse parler de ses limites et être entendu. Ce qui est mauvais, c'est que des gens soient blessés1), ce qui arrive facilement dans les conflits. C'est plus facile d'éviter les dommages si les discussions se font dans un cadre apaisé et respectueux.
En cas de conflit, il y a plusieurs rôles possibles :
Nous allons étudier chaque cas un par un en voyant ce qu'il est possible de faire.
Vous n'êtes pas d'accord, certes. Vous êtes persuadé que l'autre en face a tort, ok. Mais vous ne voulez pas pour autant qu'on en vienne à s'insulter et se faire mal. Vous aimeriez revenir à une polémique constructive, ou simplement mettre fin à la discussion puisque aucun accord ne semble actuellement possible.
Voyez aussi la partie concernant les modérateurs, il y a tout ce qu'il faut.
Vous êtes en colère, ça va pas, vous n'allez pas laisser ces péquenauds gagner.
Il y a une forte probabilité pour que vous ne lisiez pas ce texte au moment du conflit… Mais peut-être avant, ou après et dans ce cas, peut-être que quelques mots reviendront à travers la colère et arriveront à limiter les dégâts.
Vous avez le droit d'être envahi par une émotion puissante. Reconnaissez-le. Nommez-la. Montrez-la.
Mais vous n'êtes pas obligés de laisser cette émotion détruire les choses et les gens. Trouvez des façons de canaliser cette énergie pour qu'elle ne blesse personne : en tapant sur un punching-ball, en allant se battre dans une arène de jeu…
Les émotions “envahissantes” ne sont jamais anodines. Elles sont souvent le signe d'une blessure plus ancienne, très enfouie. Ça ne veut pas dire qu'il faut forcément aller voir un psy, et non, vous n'êtes pas fou ; bien qu'un psy puisse aussi aider. Mais il y a d'autres façons de faire : théâtre, croyances religieuses, jeu de rôle, écriture, expression artistique, etc2). La démarche est toujours la même :
Travaillez sur vos blessures afin d'être moins dans le réactionnel lors des conflits.
Vous êtes un troll.
Mais vous le saviez déjà, non ?
Certaines personnes prennent effectivement du plaisir dans le conflit. Ce n'est pas condamnable en soit ; ce sont des personnes qui peuvent faire de très bons modératrices, car elles n'ont justement pas peur des coups. En dehors d'internet, elles peuvent être de bonnes guerrières, donc aussi de bonnes protectrices. Aimer le conflit n'est pas le problème ; le problème viens de la façon dont on va l'exprimer.
On peut être dans une saine agressivité, par exemple dans un sport de combat, où chacun est d'accord pour se taper dessus et prendre des coups. Dans ce cas, la notion importante est le consensus : tout le monde est d'accord pour se taper, il y a des règles pour dire quand on arrête.
Un autre exemple d'agressivité bien dirigé est l'énergie qu'on peut mettre à protéger et apaiser. La difficulté étant de ne pas devenir attaquant à son tour.
Là où ça ne va plus, c'est quand l'autre n'est pas d'accord pour se faire taper. Quand quelqu'un va souffrir “pour de vrai”. Pour de vrai, ça ne veux pas dire “en dehors d'internet” : les gens qu'on fréquente sur internet sont réels, et les insultes qu'on peut leur faire le sont aussi.
Si vous vous amusez dans le conflit, trouvez une façon constructive d'employer votre agressivité. Sinon, la société tolère mal les comportements destructeurs et vous le fera payer, de façon plus ou moins délicate. Au sein d'une communauté internet, cela peut se solder par un simple bannissement. Dans le cas de harcèlement et d'insulte, il peut y avoir dépôt de plainte auprès de la justice, amenant à un procès très concret, même si les faits ont eu lieu sur internet.
Trouvez les bonnes limites à votre amusement.
Ces trois mots regroupent un rôle similaire : apaiser le conflit, permettre à chaque partie de se sentir entendu et respecté, les amener à trouver une solution à leur problème et que chacun reparte content. À peu près.
Cette fois, en plus de tout ce qui a déjà été dit, c'est la Communication Non Violente4) qui nous donne les outils les plus performants.
Avant de vous lancer dans une médiation, soyez sûr d'être “OK”. Neutre, sans parti pris, bien dans votre peau. Si vous vous sentez dépassé, respirez plusieurs fois, calmement et bougez votre corps5). Demandez du soutien à des collègues si c'est trop compliqué à gérer. Plusieurs personnes neutres et posés au sein d'un conflit aident à calmer les esprits.
Votre rôle en tant que modérateur va être d'aider chacun des acteurs du conflit à s'exprimer de façon utile, sur 4 thématiques :
Et une fois que chacun a pu s'exprimer sur ces sujets, suivant les besoins et demandes, ce que l'autre peut concéder.
Invitez chacun à s'exprimer en parlant de soi (le “je”), sans reproche et critiques ; invitez-les aussi à écouter les autres sans les couper, avec empathie, sans s'arrêter aux défauts de formulation que vous reprendre en tant que modérateur.
Chacun doit expliquer factuellement ce qu'il a observé comme significatif dans le conflit. Il ne s'agit pas de dire ce qu'on pense, mais ce qu'on a vu ou entendu, sans juger si c'est bien ou mal.
Exemple : “J'ai entendu les mots Ta mère est une gnou.”. Vous avez vu, on n'a même pas besoin de dire “c'est lui qui l'a dit” : ce qui compte, plus que la personne qui les as dites, ce sont les mots qui ont été entendus.
Autre exemple : “J'étais en train de traquer ce mob, cette personne est arrivé et l'a tué devant moi.” Là, il faut bien nommer l'auteur, mais on peut éviter les mots jugeant comme “voler ma proie”.
On peut croiser les faits, racontés par l'un et l'autre groupe, avant de passer à la suite, mais c'est parfois plus simple de faire parler l'un jusqu'au bout, puis de passer à l'autre partie, de lui demander ce qu'elle a entendue, de reformuler. Si vous faites un va et viens, veillez à ce que chaque étape se fasse l'une après l'autre et que tout le monde participe correctement.
En tant que modérateur, reformulez soigneusement, afin que ça reste au niveau des faits. Amenez les autres à la conscience des mots jugeants.
Ensuite, quel est le sentiment fasse à ce qui a été observé ? Pour certains, c'est plus facile de commencer par “je me sens…” ou de leur demander comment ils se sentent.
À présent, chacun va exprimer ses besoins. Quelle valeur personnelle a été blessée ? Qu'est-ce qui a entamé notre bonne humeur ? Les questions sont “De quoi as-tu besoin ? qu'est-ce qui est important ?”
Enfin, la partie la plus difficile : une fois que chacun a exprimé sa vision des choses, ses sentiments et ses besoins, il faut passer aux propositions. Qu'est-ce qui peut être fait pour rétablir l'équilibre ? Qu'est-ce qui pourrait embellir ma journée ? Il ne s'agit pas d'une exigence, mais d'un échange : trouver quelque chose que l'un est prêt à donner, l'autre à recevoir. Cela peut être des excuses ; parfois, le simple fait d'avoir pu échanger a déjà calmé les choses. Il peut aussi s'agir de réparations, par exemple partager le produit de la chasse, s'engager à ne plus troubler la chasse de l'autre, chasser dans des lieux différents…
Invitez les deux parties à faire des propositions réalistes et en accord avec ce qu'elles ont entendu l'une de l'autre. “Serais-tu d'accord pour … ? Voudrais-tu … ? Aimerais-tu … ?”
Dans le cas où des règles ont été transgressées, il est important de rappeler le texte de la loi, de le citer, puis de discuter avec celui qui l'a enfreint du sens de sa transgression. Il peut s'agir d'une méconnaissance ou d'une raison bien plus complexe. Un dialogue est très important sur ce genre de sujet : la transgression est souvent une façon d'attirer l'attention sur soi, de demander de l'écoute (de la plus mauvaise façon possible).
Même si l'écoute est là, il faut aussi faire respecter le cadre. S'il y a des sanctions, il faut les appliquer (en affinant au cas par cas, on ne donne pas toujours le bâton la première fois). Cela doit être fait sans colère, dans le respect de l'autre, afin de protéger la communauté. Les sanctions sont sensés êtres justes, en rapport avec la transgression. Si ce n'est pas le cas, il faut les faire évoluer. Il est important de préciser auprès de la personne qui reçoit une sanction que cette dernière est appliqué “parce que les règles doivent être respectés” et qu'il n'y a aucune haine envers la personne, mais au contraire le souhait de la voir intégrer la communauté d'une façon plus sereine.
Vous étiez dans le coin quand ça a explosé, et vous assistez, impuissant, à la bataille entre deux personnes, ou deux groupes. Même si les coups ne vous concernent pas, ce que vous voyez vous touche. Suivant la nature du conflit et votre propre nature, le sentiment peut varier énormément :
Dans ce dernier cas, vous risquez d'être une victime collatéral du conflit. C'est à dire que votre absence de réaction, votre impuissance, peuvent être mal vécues et amener quelques cauchemars. Évitons-ça.
Être témoin est extrêmement difficile et violent. Ne minimisez pas cette violence, sous prétexte que “ça ne vous concernait pas”. Au sein de Khaganat, nous avons des modérateurs formés à vous écouter dans ce genre de cas ; faites appel à eux, prenez le temps de discuter de ce qui s'est passé pour vous apaiser et ne pas vous faire envahir par des émotions désagréables.
Vous avez aussi une responsabilité importante en tant que témoin, celle de vous assurer que les victimes potentielles sont aidées.
Parfois, toutes les personnes engagées dans un conflit sont assez fortes pour se débrouiller seules et ne souhaitent pas d'intervention extérieures, mais si une seule personne présente souffre, alors il faut impérativement appeler les forces de l'ordre afin que la victime puisse être soutenue efficacement et que l'agression cesse. C'est plus facile en tant que témoin de contacter la modération (ou la police), puisqu'on est un peu à distance. Vous pouvez prendre un instant pour vérifier si vous avez bien compris la situation auprès des personnes engagées dans le conflit : la question “comment te sens-tu fasse à cette attaque” devrait suffire à savoir s'il s'agit d'un conflit consensuel ou s'il y a souffrance réelle. Dans ce dernier cas, cherchez de l'aide en priorité avant de décider d'intervenir ou de fuir. Vous avez le droit de fuir, toujours !